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L’Art Nouveau : Le Réveil de la Joaillerie

Bijoux-Art Nouveau-Lalique-
©Christie's

Les prémices de l'Art Nouveau : Un environnement étouffant

Pour comprendre l’effervescence suscitée par le style Art Nouveau il est nécessaire d’analyser et de situer le contexte historique.

                 “La symétrie n’est nullement une condition de l’art, c’est une habitude des yeux, pas autre chose”.  Hector Guimard

En effet, suite aux dérives de l’industrialisation perçues comme néfastes pour l’artisanat, de nombreuses voix s’élèvent à travers l’Europe pour préserver un savoir-faire déjà mis à mal par la production de masse.

Ainsi, au milieu du XIXe siècle en Angleterre, le mouvement Arts&Crafts prend forme en rejetant les aspects deshumanisants du capitalisme et met en avant l’idée selon laquelle le savoir-faire devait être associé aux valeurs esthétiques. Cette véritable révolution artistique fait tout de suite écho à de nombreux artistes outre-Manche : l’Art Nouveau était né.

On retrouve le terme Art Nouveau pour la première fois en Belgique, il gagne rapidement en popularité à travers l’Europe. Les artistes s’inspirent de l’engouement rencontré par le Japonisme et le choc culturel engendré par celui-ci en dépassant la réinterprétation des styles anciens qui était jusqu’à présent la référence.

William Morris

Un souffle nouveau venu d'Asie

“Quatre ans venaient de suffire au Japon pour attirer toute la clientèle artistique de Paris”. Emile Zola, Au Bonheur des Dames, 1883.

La nature a été la clé de voute de l’Art Nouveau manifestée de façons diverses et variées. Les artistes s’inspirent du spectacle offert par la faune et la flore. Les insectes à l’image des libellules et des papillons, les orchidées ou encore les branchages apparaissent sur de nombreux objets. Mais la grande innovation c’est l’apparition d’éléments exotiques, suivant la tendance du moment et l’intérêt porté au Japon.

Japonisme Art Nouveau
©Artcurial

Le Japon, longtemps considéré comme un pays sous développé revint au goût du jour au XIXe siècle. En effet, c’est dans les galeries d’art et lors d’expositions universelles que l’ont peu désormais redécouvrir le travail des artisans japonais, les estampes sont mises à l’honneur. Les lignes, les courbes et l’irrégularité de la forme contrastent totalement avec les standards de la production de masse européenne. C’est un véritable souffle nouveau qui arrive en Europe.

Ainsi en 1867 lors de l’Exposition Universelle à Paris on peut admirer au Champ-de-Mars un pavillon construit par des artisans japonais et de nombreux objets qui seront vendus au public ce qui suscitera un énorme engouement. Cet air frais venu d’Asie va tout de suite inspirer les artistes de l’Art Nouveau, on peut alors retrouver des éléments exotiques tels que des animaux, des insectes ou des fleurs comme le lotus.

La nature et les décors japonisants vont tout de suite être adoptés par les grands joailliers qui voient en ces thèmes une façon de rompre avec les styles traditionnels laissant place à la créativité et à l’audace.

Les Joailliers de l'Art Nouveau

Sous l’impulsion de la révolution artistique en train de s’opérer, les joailliers ne sont pas en reste. En effet, le bijou au XIXe est cloisonné par l’historicisme à l’instar des réalisations Belle Époque sans réelle audace. La nouvelle vague engendrée par le mouvement Arts&Crafts, l’intérêt pour la nature et le Japonisme inspirent immédiatement les grands bijoutiers comme René Jules Lalique considéré aujourd’hui comme l’une des grandes figures de l’Art Nouveau.

Lalique, formé chez Louis Aucoc tombe littéralement amoureux de l’art japonais qu’il a découvert lors des expositions universelles de 1867 et 1878. Après un passage dans plusieurs maisons de joaillerie notamment chez Vever, il fonde son propre atelier en 1885. Ses bijoux sont en parfaite harmonie avec le courant Art Nouveau, il utilise la faune et la flore comme le paon et la libellule qu’il représentera de nombreuses fois. Il utilise des matériaux peu commun en bijouterie à cette époque tels que le verre, l’émail ou la corne, et dans un esprit de rupture il préfèrera utiliser des pierres semi-précieuses comme l’ Aigue-Marine ou le Peridot. René Lalique impressionne lors des salons où il expose ses créations, de nombreux clients affluent du monde entier pour découvrir et arborer ses créations tels que Sarah Bernhardt ou Calouste Sarkis Gulbenkian.

art Nouveau Georges Fouquet
Collier signé Fouquet vers 1900
Vever Art Nouveau Joaillerie
Ornement de corsage par Vever vers 1900

Les joailliers de l’Art Nouveau se veulent audacieux, créatifs, révolutionnaires. Ils vont utiliser des matériaux innovants, des pierres peu courtisées ainsi que des techniques nouvelles à l’image de l’émaillage dit “plique-à-jour” emblématique de cette période. Fini les parures empierrées, les diamants sont éclipsés par l’opale, l’émail ou le verre ils servent uniquement à rehausser l’ouvrage.  

L’émaillage plique-à-jour est une technique très ancienne remise au goût du jour au XIXe siècle. Elle est semblable à la méthode du cloisonné mais elle n’a pas de fond métallique ce qui laisse passer la lumière à travers l’émail translucide offrant un joli jeu de couleurs. L’oeuvre du joaillier Henri Vever par exemple est riche de pièces qui utilisent cette méthode pour magnifier le bijou mais également pour le rendre plus vivant lorsqu’il représente la faune et la flore. Henri Vever utilise un répertoire plus poétique que Lalique. Il utilise beaucoup de sujets issus du registre légendaire, il met également en avant la femme, belle et sensuelle qui occupe une place de plus en plus importante au sein de la société. Cette dernière peut revêtir chez Vever plusieurs formes : un papillon, une nymphe ou encore une fée. 

Autre artiste important de l’Art Nouveau en Joaillerie : Lucien Gaillard, est quant à lui totalement inspiré par le Japon, à son atelier parisien il n’est pas rare de rencontrer des artistes japonais qu’il héberge chez lui. Cette fascination pour ce pays se reflète dans son travail. Les peignes par exemple sont ornés de motifs japonisants.

Georges Fouquet, l’un des joaillier les plus en vue de Paris à l’époque oriente son travail vers le thème de la femme qu’il partage avec son ami non moins célèbre : Alfons Mucha. Ce dernier réalisera d’ailleurs une boutique impressionnante qui sera exposée au musée Carnavalet.

D’autres joailliers suivront la vague Art Nouveau, ils rivaliseront d’audace pour créer des pièces toujours plus somptueuses et remarquables dans un esprit de liberté totale, de retour aux sources, marquants un réel tournant qui va inspirer et continue d’inspirer de nombreux bijoutiers …

Si vous souhaitez découvrir d’autres pièces Art Nouveau vous pouvez visiter la page Instagram @bijouxancienslyon

Henri Dubret Art Nouveau Joaillerie
©Macklowe Gallery

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