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Collectissim Magazine N°6 - Émeraude Colombienne
N°6
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Víctor Carranza : Le Tsar de l’émeraude colombienne

Víctor Carranza, souvent surnommé le « tsar des émeraudes », est une figure emblématique de l’industrie minière colombienne. Issu d’une famille modeste de Guateque (Boyacá), cet ancien mineur a bâti un véritable empire autour de l’émeraude colombienne. Son parcours hors du commun, de la pauvreté à la puissance, illustre l’importance de la mine pour l’économie locale et laisse un héritage durable dans la région.

Biographie de Víctor Carranza

Né le 8 octobre 1935 à Guateque (Boyacá), Víctor Manuel Carranza grandit dans une grande famille paysanne. Orphelin de père à l’âge de deux ans, il quitte l’école très tôt et travaille dès son plus jeune âge dans les mines d’émeraudes pour aider sa famille. Dès 1947, il creuse les sols de Gachalá (Cundinamarca) à la recherche de gisements, trouvant plusieurs sources prometteuses. Il découvre officiellement sa première mine, Peñas Blancas, en 1959 où il trouve sa première émeraude “gota de aceite“. Ces premiers succès marquent le début de son ascension : il accumule les concessions et s’implante progressivement dans la principale région minière de Boyacá.

Photo de Víctor Carranza, le Tsar de l'émeraude colombienne
Víctor Carranza

À l’âge de 23 ans, il réussit à obtenir du gouvernement colombien un permis d’exploitation des mines de Nuevo Mundo, La Vega, San Juan de Ubalá et Gachalá. Deux ans plus tard, il est autorisé à exploiter les mines de Peñas Blancas, à San Pablo de Borbur. Deux ans plus tard, il est appelé à participer à l’exploitation des mines de Peñas Blancas, à San Pablo de Borbur, mais les conflits sociaux, la violence, la corruption officielle et les problèmes d’ordre public le font retourner dans l’est où le gouvernement lui confie les mines de Las Cruces, El Diamante et El Toro.

Une ascension difficile rythmée par les conflits

La mort violente d’Efraín González le 9 juin 1965 finit par déstabiliser la situation. Une nouvelle vague de violence débute dans la région de Boyacá, faisant plus de 1 200 morts dans les municipalités de Chiquinquirá, Muzo, Coscuez, Borbur et Somondoco. En 1969, il réalise l’un de ses rêves : découvrir ce qui est alors catalogué comme la plus grande émeraude du monde : « la Emilia », une pierre de 7015 carats trouvée dans la mine de Las Cruces. Malgré les violences et les conflits, Víctor Carranza réussit à tirer son épingle du jeu. Grâce à une stratégie mêlant médiation, philanthropie (il finança des églises, des routes, des écoles), alliances politiques et prudente distance avec le narcotrafic, il consolida sa position de leader suprême du monde des émeraudes.

Le gouvernement s’est rapidement rendu compte que la fermeture des mines et leur mise sous surveillance policière ne faisaient que contribuer à la corruption de la police. Il a alors été décidé d’inviter les principaux exploitants d’émeraudes du pays à un appel d’offres public pour proposer la concession des principales mines à une société composée des exploitants eux-mêmes. C’est ainsi qu’Esmeracol s’est vu confier les mines de Coscuez, qui s’étendent sur plus de 50 hectares ; Compañía Colombiana de Explotaciones Mineras (Coexminas), propriété de Victor Carranza, a repris les reines de Peñas Blancas ; et Tecnicas Mineras ltda. (Tecminas), gérée par Gilberto Molina en association avec Víctor Carranza, a pris en charge l’exploitation du secteur de Quípama, près de la municipalité de Muzo

Victor Carranza était associé à Gilberto Molina
Gilberto Molina (au centre en chemise blanche) avec des mineurs à Muzo

À la fin des années 1980, l’extraction d’émeraudes en Colombie est de nouveau marquée par des conflits armés entre barons rivaux. C’est Gilberto Molina lui-même qui introduisit dans les mines celui qui deviendrait plus tard son propre assassin et le principal instigateur de la nouvelle guerre verte dans la région : Gonzalo Rodríguez Gacha, alias El Mexicano. Rodríguez Gacha voulait consolider son pouvoir dans la région et lorsque le baron de la drogue leur aurait proposé de participer à l’exploitation minière en tant que partenaires, Molina et Carranza auraient refusé, ce qui aurait entraîné de violentes représailles de la part du baron. Le 27 février 1989, alors qu’il célébrait son anniversaire, douze hommes en uniforme militaire firent irruption et abattirent Molina, ses gardes du corps et ses invités. Plus tard, c’est une bombe qui explose dans les bureaux de Tecminas à Bogotá, propriété de Carranza, et un de ses neveux qui est assassiné.

José Gonzalo Rodríguez Gacha alias El Mexicano

Avec la mort de Rodríguez Gacha, le 15 décembre 1989 à Tuluá, un processus de paix fut enclenché. Il culmina avec la signature officielle de la paix le 12 juillet 1990, à Quípama, et Víctor Carranza en fut l’un des principaux artisans.

La carrière et le rôle de Víctor Carranza dans l’industrie de l’émeraude colombienne

Au sommet de sa carrière, Víctor Carranza contrôle une part majeure du commerce mondial de l’émeraude colombienne. Il possédait des millions d’hectares de terres riches en gisements, dont certains ont été formellement attribués à des proches ou associés. Par exemple, il est connu pour avoir découvert et posséder la fameuse émeraude « Fura », un cristal brut de 11 000 carats (environ 2,2 kg) extrait de Muzo.

Photo de Víctor Carranza, le Tsar de l'émeraude colombienne

La stratégie de Carranza consistait à examiner chaque mine, investir dans les infrastructures et négocier directement les ventes. Il rencontrait personnellement les acheteurs internationaux et vendait ses émeraudes dans des villes comme New York, Shanghai ou Dubaï.

Don Víctor savait que la paix dans la région de Boyacá dépendait du partage de la richesse, il arrivait qu’il alimente lui-même le processus minier pour distribuer la richesse. Comme l’explique son biographe, Carranza organisait des inondations contrôlées pour qu’un millier de petits mineurs locaux puissent extraire des émeraudes de la boue. Cette forme de redistribution a permis de réduire les tensions sur le terrain et de faire de ses concessions minières une zone relativement stable.

Controverses et sécurité

Víctor Carranza a été une personnalité controversée et a souvent démenti les allégations portées contre lui. Des enquêtes l’ont visé à plusieurs reprises : on l’a accusé de financer des milices privées pour protéger ses mines et d’être lié à des groupes paramilitaires. Il a aussi survécu à plusieurs tentatives d’assassinat (en 2009 et 2010) lors de son périple vers les champs aurifères d’Oriente. En 1998, il a été brièvement incarcéré pour formation de milices, mais aucun procès n’a finalement abouti. Les partisans de Carranza soulignent qu’il a toujours maintenu son innocence et qu’aucune condamnation définitive n’a entaché son nom.

Photo de Víctor Carranza, le Tsar de l'émeraude colombienne

Il convient de souligner que cet homme d’affaires n’était pas un « baron de la drogue » au sens courant. Même si certains observateurs critiquent ses méthodes expéditives, ses proches insistent sur le fait qu’il militait pour la sécurité des mines et le bien-être des communautés locales. En fin de compte, Carranza reste pour beaucoup un entrepreneur visionnaire qui a su naviguer « dans cette zone grise où il faut des hommes armés pour survivre ».

Héritage et mémoire à Boyacá

Après sa mort en 2013 des suites d’un cancer du poumon, l’empire de Víctor Carranza a connu des remaniements, mais son influence persiste à Boyacá. Son portrait et son surnom de « tsar des émeraudes » demeurent présents dans les récits et les musées locaux. De nombreux habitants se souviennent de lui comme d’un bienfaiteur qui a contribué à faire rayonner la région.

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